Livre. C’était le 10 décembre 2020 au tribunal correctionnel de Paris, où s’achevait le procès dit « des écoutes » qui valait à Nicolas Sarkozy, son avocat Thierry Herzog et l’ex-magistrat Gilbert Azibert de comparaître pour corruption et trafic d’influence. Toute la presse du jour saluait la rigueur et l’efficacité de la plaidoirie prononcée la veille par Jacqueline Laffont, en défense de l’ancien président de la République. « S’il y a bien une chose que Nicolas Sarkozy n’a pas dû regretter, c’est d’avoir choisi une femme pour le défendre. Une femme pour raconter une histoire d’hommes », écrivait-on dans ces colonnes. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Procès des écoutes : « Nous ne sommes pas dans le code pénal. Nous sommes dans la vie ! », plaide l’avocate de Nicolas Sarkozy Dans la salle d’audience, une des consœurs de Me Laffont, Corinne Dreyfus-Schmidt, nous confiait sa fierté et son bonheur de voir une avocate occuper enfin la première place de l’attention. Alors que nous échangions sur la faible notoriété des femmes pénalistes par rapport à leurs confrères masculins, elle ajouta, avec une pointe de causticité : « Vous y avez largement votre part. » L’associée éclipsée Corinne Dreyfus-Schmidt a raison. Dans les comptes rendus d’audience, les entretiens, les portraits, l’avocat a longtemps été un homme. Une poignée d’hommes, même, se partageant les plus gros dossiers criminels ou les affaires politico-financières les plus retentissantes. A côté de chacun d’entre eux, il y avait pourtant le plus souvent une femme qui connaissait le dossier comme eux, voire mieux qu’eux. Une associée que l’on avait écoutée d’une oreille parfois distraite en attendant le ténor, et dont la présence n’était signalée que par quelques lignes ou par la mention polie de son nom. Dans ce temps d’exposition publique du procès pénal, elle s’éclipsait autant qu’elle était éclipsée. Alors oui, le livre que l’avocate Julia Minkowski et la journaliste Lisa Vignoli consacrent à plusieurs femmes pénalistes et au procès de leur vie tombe à pic. Le hasard du calendrier a voulu qu’il s’écrive l’été où Gisèle Halimi s’est éteinte. « Chaque femme sait ce qu’elle lui doit. Chaque avocate aimerait lui ressembler », soulignent les autrices. Reprenant à leur compte la vigoureuse tribune de leur consœur Laure Heinich (parue dans L’Obs le 9 août 2020) – « Vous étiez où, confrères masculins ? Vous nous avez manqué… » –, elles s’étonnent qu’aucun ténor n’ait jugé utile d’assister aux obsèques de cette figure du barreau, alors que « d’ordinaire, ils se pressent aux hommages funéraires, guettant si le siège qui leur a été réservé est bien à la hauteur de l’idée qu’ils se font de leur position ». Il vous reste 56.9% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
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« L’Avocat était une femme », paroles de « ténoras » du barreau
